Tribunes

Plus de smart cities ou de citoyens intelligents ?

Publié le 18/02/2022

Alors que le dictionnaire de la CNIL et la majorité des acteurs de l’immobilier, des constructeurs, des écologistes et des politiciens en quête de votes, reconnaissent la smart city comme un nouveau concept de développement urbain, il n’en est pas moins que l’objectif premier des villes intelligentes doit être d’améliorer la qualité de vie des citadins.

Comment ? En rendant la ville et son organisation plus adaptables et plus efficaces, grâce aux nouvelles technologies qui s’appuient sur un écosystème d’objets et de services.

Le champ d’application de ce nouveau mode de gestion des villes est vaste : infrastructures publiques, réseaux, transports, e-services, e-administration, etc. En d’autres termes, la ville intelligente serait une ville technologiquement avancée dans laquelle les habitants seraient invités à vivre et à bénéficier des synergies des services augmentés par la technologie.

Un concept coupé de la réalité ?

Cette ville intelligente est une belle intention, mais la phase de développement de ce type de projet révèle une myriade d’inégalités. Le succès des villes intelligentes fluctue en fonction de l’emplacement. La couverture du réseau de téléphonie mobile est très différente dans le centre d’une riche capitale, dans les banlieues de cette même capitale ou dans un petit village au milieu de nulle part. Prenez une jolie petite ville comme Leménil-Mitry (Meurthe-et-Moselle), où obtenir un simple signal 3G peut nécessiter de grimper sur le point le plus haut de votre jardin. Impossible d’imaginer un système d’éclairage public connecté et auto-éclairé dans un tel endroit.

Aujourd’hui, la « ville intelligente » est encore un rêve lointain plutôt qu’une réalité proche, même si certains candidats politiques aiment à la promettre à leurs futurs électeurs. Cependant, des communautés remettent déjà en question l’utopie de la ville intelligente et la modèlent pour la rendre plus humaine et plus connectée.

L’avènement des réseaux sociaux a créé une passerelle de communication entre les individus à une plus grande échelle. Il existe plusieurs initiatives numériques destinées à faciliter la vie de chacun, et elles se sont développées, dans un premier temps, sans l’aide des acteurs de la société.

Le numérique comme facilitateur du quotidien

La plateforme Waze, par exemple, est basée sur un outil collaboratif de compréhension du trafic optimisé par les conducteurs ; les utilisateurs indiquent l’état des embouteillages, l’emplacement des véhicules de police, les accidents et même les animaux morts sur le bord de la route, le tout au bénéfice des autres utilisateurs. Waze est un système d’alerte qui facilite la vie des conducteurs, et les aide même à subvertir l’autorité (il a été racheté par Google in fine).

Sur Facebook, d’innombrables groupes collaboratifs existent pour s’entraider dans leurs quêtes quotidiennes. WANTED Community, les Mamans du 9eme arrondissement, Pet Alert : la liste est longue … Désormais les plus grands acteurs s’inspirent des communautés pour développer de nouveaux services numériques. Beaucoup d’influenceurs et animateurs de podcasts créent également leurs propres groupes Facebook privés pour leurs fans afin d’éviter de recevoir des commentaires de troll sur leurs canaux publics.

Enfin, jetons un œil à Smiile : plus qu’un réseau social, Smiile est un réseau social qui facilite les échanges et le partage entre les habitants de votre ville ou territoire. Smiile contribue à créer du lien social en permettant aux utilisateurs d’organiser l’entraide via un riche panel de services collaboratifs et inclusifs et assure une communication ciblée en temps réel en se connectant aux canaux numériques existants.

Si les plateformes technologiques fournissent la plateforme et le service, elles servent simplement de vecteurs de la communication des besoins. Elles répondent directement aux besoins des consommateurs puisque ces derniers en sont les initiateurs. D’une certaine manière, elles contribuent à créer une ville intelligente, via des solutions qui facilitent la vie dans la ville. Et les citoyens s’en donnent à cœur joie !

Un pas dans la ville participative

Les citoyens sont créatifs et pleins de ressources, car ce sont eux qui connaissent le mieux leurs propres besoins. Et l’objectif le plus intelligent est de les impliquer dans la conception des villes et des infrastructures de demain. La ville participative est une véritable tendance, sans doute l’une des plus importantes qui aura un impact sur la société dans un avenir proche. D’une certaine manière, l’idée est plus de construire une ville composée de citoyens intelligents que de construire une ville intelligente.

Un exemple de ville participative ou collaborative se trouve en Norvège. La ville de Hamar a demandé aux habitants de revitaliser un énorme parking totalement abandonné, en lieu accueillant de l’art. Dans une réponse révolutionnaire à une pratique standard, le collectif a décidé d’ignorer la demande initiale et a plutôt réimaginé l’espace comme une série d’événements pour amener les citoyens sur la place. Les débuts ont été difficiles, mais le jour où ils ont réuni tout le monde autour d’un verre de vin et de tranches de jambon espagnol, les choses ont commencé à bouger (ateliers, conférences, plateforme web participative…).

Sans communauté, il n’y a pas d’espace public, pas d’utilisation, et pas d’appropriation. Une fois la dynamique lancée, la place a été conçue autour des attentes et des désirs de cette même communauté. Cet acte fondamental devrait être utilisé comme un modèle pour l’avenir des lieux publics.

Les résidents devraient pouvoir impacter l’avenir de la propriété et de la conception des lieux publics. À partir de là, un autre défi se présente : coordonner la dynamique de la communauté, pour accompagner cette initiative vers un aboutissement concret.